Tour d’horizon sur les conditions suspensives
L’acte de vente et notamment l’avant contrat (entendons ici compromis ou promesse de vente) est une affaire d’équilibre entre le VENDEUR et l’ACQUÉREUR.
Cet équilibre, s’il semble évident en ce qui concerne le prix et le bien, doit également être évident concernant vos conditions d’achat.
Il n’est pas ici question de vous faire peur mais plutôt de vous sensibiliser à la valeur ajoutée de votre anticipation.
Pour moi, l’anticipation est la clé d’un dossier réussi !
Juridiquement, faire une offre c’est s’engager. Donc modifier son offre c’est modifier son engagement. Et si l’on modifie son engagement, on donne la possibilité au VENDEUR de ne plus être d’accord de nous vendre…
Donc dire à son VENDEUR :
- que l’on va faire un peu plus de travaux que prévu,
- prendre un peu plus de temps que prévu,
- demander un peu plus d’argent que prévu, c’est modifier son offre et donc son engagement.
Néanmoins et je le sais, il faut souvent concilier vitesse et protection. Comment faire pour dire à son VENDEUR ou à l’agence que nous sommes intéressés tandis que le projet ne verra le jour que dans 1 an ou 1 an et demi ?
Le secret, on est sympa on vous le donne : c’est la CONDITION SUSPENSIVE.
Elle va venir vous protéger intelligemment des risques de l’achat tout en garantissant un sérieux auprès du VENDEUR.
Pour moi un dossier solide, est un dossier où l’on définit les étapes avec le VENDEUR et donc c’est un dossier qui a plus de chance d’être accepté.
L’objectif de cet article est alors de vous sensibiliser à la pratique de ces conditions, à les faire entrer dans votre couteau suisse ( ou tout autre nationalité ) de la négociation.
Et cet outil fonctionne toujours pareil : le pourquoi, le comment et le combien de temps !
J’emprunte, je paye, je me protège
Nous commençons avec la reine des conditions suspensives, la condition de prêt. Elle va être votre protection sur tout le projet en ce qui concerne la faisabilité financière de l’ensemble. En résumé, vous n’achetez que si la ou les banques vous suivent sur votre projet. Pas d’argent, pas d’achat (pas de chocolat ) et donc pas d’indemnité à verser à votre VENDEUR.
C’est la clause la plus simple à rédiger mais aussi celle qui peut vous faire perdre le projet ou la confiance des VENDEURS.
En ma qualité de notaire, je suis obligé de suivre ce qui est indiqué dans votre offre d’achat et notamment d’appliquer le montant du prêt souhaité et déclaré dans l’offre.
J’insiste mais on ne peut pas modifier le montant de son apport chez le notaire.
C’est un peu comme si on arrivait en caisse et que l’on disait «100 EUROS de courses, non je vous en donne que 20», Stupide non ?! Et bien c’est pareil pour votre acquisition.
Donc on anticipe et l’on prévoit finement son financement quitte à être un peu trop gourmand sur le prêt. En effet, on peut toujours emprunter moins que ce qui est indiqué mais jamais plus.
On prévoit aussi la durée de son prêt et son taux maximum d’emprunt, c’est-à-dire sa mensualité maximum pour son projet.
Et là on hésite pas à s’entourer des bonnes personnes pour construire son dossier de prêt. Cela permet d’asseoir sa condition vis-à-vis du VENDEUR.
En résumé :
Pourquoi : Pour me protéger en cas de refus de financement par les banques.
Comment : En indiquant le montant, le taux et la durée de mon prêt et en ne surestimant pas mon apport bien au contraire.
Combien de temps : On compte 3 mois après l’obtention de toutes les autres conditions ( notamment de permis).
L’astuce en plus : On intègre au montant du prêt, son prêt de trésorerie pour avoir une enveloppe globale.
Je construis, je rénove, je me protège
C’est sûrement la condition la plus difficile à faire entendre au VENDEUR car c’est la plus longue. Il est donc ici question de se protéger vis-à-vis des travaux et/ou de la construction envisagée sur le futur bien. C’est une longue lutte juridique qu’il faut anticiper. Longue c’est-à-dire 8 mois en général, une éternité en somme pour votre VENDEUR qui ne pourra qu’ attendre sans maîtriser ce qui se passe.
Ici aussi la clé c’est l’anticipation, il faudra expliquer votre projet à votre VENDEUR, pourquoi pas avec des plans ou des projections.
Côté notaire, cette condition se rédige autour d’un timing à respecter, la temporalité de votre projet.
D’abord le temps nécessaire pour déposer un dossier (de 1 à 3 mois en fonction des projets), puis le temps d’obtention du permis (de 2 à 3 mois maximum) et enfin l’attente pour que le permis soit définitif (3 mois). Vous vous doutez donc que cela ne doit pas être découvert par votre VENDEUR après votre offre !
En résumé :
Pourquoi : Pour me protéger en cas de refus du permis de construire
Comment : En indiquant la nature du projet et les délais souhaités
Combien de temps : 8 ou 9 mois
L’astuce en plus : On intègre son VENDEUR aux étapes du projet, notamment en l’informant du dépôt ou de l’obtention du permis pour le rassurer
Je change de vie, je vends, je me protège
Si votre projet c’est de changer de vie, ce que je comprends fort bien, il vous faut peut-être vendre votre bien pour acheter le nouveau de vos rêves. Ici aussi anticipons
En notre qualité de notaire nous pouvons conditionner votre nouvel achat à la vente de votre bien, cela ne pose pas de difficultés mais c’est ici une question d’ordre.
Vous devez avoir déjà signé un avant contrat pour votre vente avant de signer celui pour votre achat, à défaut pas de protection possible. Et autre mauvaise nouvelle, la réciproque n’est pas vraie on ne peut pas conditionner votre vente à votre achat.
Ici aussi la transparence est de mise car il faudra indiquer dans la promesse, le prix de votre vente et la durée de votre propre promesse.
En résumé :
Pourquoi : Pour me protéger en cas de NON vente de mon bien
Comment : En indiquant le bien vendu, le prix et la durée de la vente
Combien de temps : le temps de votre propre promesse de vente
L’astuce en plus : On vérifie les conditions de son propre ACQUÉREUR pour éviter autant que possible l’accumulation de la vente en cascade
Pour tout le reste, je me protège
Ce ne sont ici que les exemples les plus courants mais sachez que nous pouvons tout inventer ensemble, selon votre contexte. Il n’existe qu’une seule règle, un accord réciproque entre le VENDEUR et l’ACQUÉREUR et donc une honnêteté sur le projet et sur le délai.
Je vous le livre comme un retour d’expérience, si la communication est bonne tout est possible mais il ne faut ni la flouer ni la rompre.
Mais nous allons essayer de finir sur une touche de légèreté. La rédaction de la condition suspensive prévoit forcément le pire et le plus long des timing et ne tient pas compte de l’humain (nous ne sommes pas sympas nous les notaires je vous l’accorde) mais l’humain vous appartient.
Si vous déposez le permis plus tôt ou que votre courtier avance plus vite que prévu sur le dossier, il est toujours possible de raccourcir les délais. De même si vous gagnez au loto ou que mamie vous fait une donation, vous pouvez toujours renoncer à vos conditions suspensives.
En somme, prévoyons le pire tous ensemble avec votre VENDEUR et soyons heureux, également tous ensemble, pour que tout se passe mieux que prévu et pas l’inverse ! Je l’écris une dernière fois pour le plaisir, l’anticipation est la clé d’un dossier qui avance bien et donc d’un notaire heureux .


